Le mordillement chez le chien

Comme il y a un certain nombre de sujets qui reviennent régulièrement sur le groupe, que pas mal d’entre vous s’apprêtent à accueillir un chiot dans les prochaines semaines ou les prochains mois, et que je vois encore parfois certains conseils qui ne s’inscrivent pas forcément toujours dans une démarche positive ou bienveillante, j’ai décidé d’écrire toute une série de posts, traitant de tous les sujets récurrents, à raison d’un par semaine je pense.
Aujourd’hui, on attaque donc ce premier volet avec un problème que nous avons tous rencontré : les mordillements.
• POURQUOI font-ils cela ?
Tout d’abord, il faut savoir que le mordillement est une phase naturelle chez tout chiot, qui découvre et appréhende son environnement avec sa gueule.
S’il est vrai que cela peut s’avérer parfois douloureux pour nous, à cause de leurs petits aiguillons de vampire acérés qui se plantent dans notre peau comme dans du beurre, on se consolera en se disant que les mordillements se calment généralement avec l’apparition de la dentition définitive, vers 4/5 mois.
• Ok, c’est donc normal mais COMMENT y remédier ?
Dans la mesure où vous ne pourrez pas les empêcher, il faudra apprendre à les gérer au mieux et à faire preuve de patience.
La meilleure solution ? L’ignorance. Dans la majorité des cas, votre chiot vous mordillera pour demander de l’attention afin que vous vous occupiez de lui. Il faut donc résister et l’ignorer totalement. Vous ne le regardez pas, vous ne lui parlez pas (on oublie donc le « Non ! ») et vous ne le repoussez pas : c’est bien simple, pendant quelques dizaines de secondes, le temps qu’il se calme, il n’existe plus.
« Oui, mais ça ne marche pas et il mordille encore plus fort »
Normal. Avant que ce comportement diminue jusqu’à disparaître presque totalement, votre chiot, frustré que vous l’ignoriez ainsi, va intensifier ses demandes.
C’est un peu comme un enfant qui tire sur le pantalon de sa maman pour avoir son attention alors que celle-ci est en pleine conversation avec quelqu’un : si elle l’ignore, il va s’exciter et tenter de tirer plus fort. Si elle craque et lui répond, même si c’est pour le disputer, il aura gagné et recommencera la fois suivante puisque ça marche : elle se sera intéressée à lui. Par contre, si elle continue à l’ignorer, il finira par se lasser et arrêtera puisque cette méthode ne marche pas.
Il faut donc tenir bon et ne pas céder, même lorsque ça devient énervant et qu’on a envie de le repousser.
• autre solution, en complément : DÉTOURNER son attention sur autre chose.
Durant cette période parfois pénible, il faut bien l’avouer, les jouets et autres friandises à grignoter seront vos meilleurs alliés.
Alors, détourner ses mâchoires sur une autre cible, oui c’est une excellente idée… mais pas n’importe comment.
On sait que la règle de base de l’éducation positive consiste à ignorer les comportements indésirables et à renforcer les « bons » comportements. Donc, à votre avis, que risque-t-il de se passer si vous lui donnez un sabot de veau par exemple, dès qu’il vient s’attaquer à vos orteils ?
C’est simple, il fera très vite le lien entre « je mordille = j’obtiens un truc sympa ». En gros, vous viendrez de récompenser et de renforcer un comportement indésirable et il recommencera puisque c’est dans son intérêt de venir vous mordiller.
Je vous conseille donc de l’ignorer totalement quelques instants et, seulement ensuite, de lui donner le sabot de veau. Ainsi, il ne fera pas le lien de cause à effet.
• Ce qu’il ne faut PAS faire !
Il n’est pas rare encore aujourd’hui de lire ou d’entendre certains conseils qui n’ont plus lieu d’être en 2018, avec les connaissances que l’on a désormais sur les chiens. Voici donc une liste non exhaustive de choses à franchement éviter, sous peine de causer un stress inutile, voire même de déclencher certains troubles du comportement à terme :
– Lui dire « non ! » fermement. Encore une fois, le non n’apprendra rien à votre chien. Pire, il pourra même s’exciter et renforcer ses demandes.
– Mordre l’oreille du chiot « comme le ferait sa mère ». Non, vous n’êtes pas un chien ni sa mère.
– Maintenir le chiot plaqué au sol, sur le côté ou sur le dos. Non, à part engendrer une frustration inutile, ça ne servira à rien. Dites-vous que la dominance inter-espèces n’existe pas chez le chien et que cela n’aura aucun sens pour lui, puisque c’est ça dont il s’agit quand certaines personnes veulent mettre un chiot en position de « soumission », montrer qui est le boss.
– Lui mettre la main dans sa gueule / lui pincer ou l’obliger à se mordre les babines. Honnêtement, alors que vous apprenez à vous connaître et à tisser les premiers liens avec lui, ai-je besoin d’expliquer pourquoi ces pratiques sont lamentables ?
« Oui, mais c’est mon véto / éleveur / éducateur canin qui m’a conseillé ça et ça marche ! »
On peut aussi élever un enfant à coup de claques dans la gueule à longueur de journée. Ça marchera dans la plupart des cas, mais il y aura sans doute à prix à payer un jour et je ne suis pas sûr que ce soit le type de relations, basées sur un rapport de force perpétuel, dont on rêve pour son quotidien.
Avec votre chien, c’est la même chose : soyez son guide et non son maître. Vous verrez, on obtient nettement plus par la douceur et la compréhension que par la contrainte
• Petites ASTUCES :
Variez les plaisirs. Donner toujours la même friandise ou les mêmes jouets engendrera l’ennui. Donc, parfois un sabot de veau, parfois une corde à noeuds sur laquelle on aura frotté un bout de jambon au préalable, parfois quelques friandises ou même des croquettes planquées dans un tapis de fouille. Bref, on évite la routine.
Pareil pour les jouets : si vous en avez une dizaine par exemple, ne les rendez pas tous disponibles en permanence. Faites-les tourner, en retirant parfois certains d’entre eux : votre chiot sera tout content de retrouver son petit cochon en peluche qu’il n’aura pas vu depuis 3 jours et il aura d’autant plus de valeur à ses yeux.
• BONUS : le bon côté des mordillements.
Puisque vous ne pourrez pas y échapper, autant mettre cette période à profit. En effet, puisqu’il mordille comme un petit démon, vous allez pouvoir en profiter pour lui apprendre une chose assez essentielle : l’inhibition à la morsure, autrement dit à doser la puissance de sa mâchoire.
Pour se faire, vous jouez avec lui et, dès qu’il mordille un peu trop fort vos doigts par exemple, vous poussez un petit cri aigüe, feignant la douleur, et vous l’ignorez totalement pendant quelques dizaines de secondes, comme expliqué plus haut.
Vous revenez ensuite à jouer avec lui et, s’il recommence, même réponse de votre part : le petit cri + ignorance. Et vous le refaites autant de fois que nécessaire mais, très vite, votre chiot comprendra que s’il veut que le jeu continue, il faut qu’il serre moins fort.