Le Rappel

C’est généralement le sujet qui fâche, la source de discordes et de discussions aussi passionnées qu’interminables entre les propriétaires de Shiba.
Impossible, voire suicidaire aux yeux des uns, apprentissage essentiel et pratique régulière pour les autres… alors, qu’en est-il du rappel chez nos compagnons préférés ?
Cette semaine, dans ce second volet, nous allons donc essayer de nous attaquer à cette notion délicate et de faire le tour des techniques à mettre en place pour y parvenir, mais aussi des risques à prendre en considération, car il y en a également. Bonne lecture à tous
• Avant tout, débarrassez-vous des ÉTIQUETTES !
S’il y a bien un ennemi juré de l’éducation canine, c’est l’étiquetage des races. Vous savez, ces préju… pardon, ces caractéristiques censées être partagées par tous les individus au sein d’une même race, sans aucune autre forme de distinction.
Ainsi, par exemple, tous les Husky seraient fugueurs, tous les Jack Russel seraient incontrôlables, tous les chiens-loups seraient destructeurs, tous les Akita dévoreraient leurs congénères du même sexe… et tous les Shiba n’auraient aucun rappel.
J’avoue, ce serait bien pratique pour choisir son chien si c’était aussi simple que ça mais, dans la mesure où chaque individu a sa propre personnalité, cela tient bien évidemment plus du cliché que de la règle scientifique.
Il ne vous viendrait pas à l’esprit de résumer tout le genre humain en 3 adjectifs qualificatifs. Pourquoi voudriez-vous y parvenir avec une race de chiens ?
« Oui mais notre éleveuse nous a bien prévenus sur le fait qu’un jour il risquait de ne pas revenir »
Et, vous savez quoi ? Elle a entièrement raison de vous dire ça car, si le rappel est loin d’être une mission impossible avec votre Shiba Inu, l’apprentissage de ce dernier nécessitera un certain savoir-faire ainsi qu’un véritable investissement de votre part, aussi bien en termes de temps que d’énergie et ce, durant toute la vie de votre animal. Donc, oui, dans la mesure où tout le monde ne saura pas comment s’y prendre ou n’aura tout simplement pas le courage et la volonté de faire ce travail, il est normal et même rassurant qu’elle vous tienne ce discours.
En effet, soyons clairs : vous n’aurez jamais un rappel garanti à 100% et à vie de la part de votre Shiba. Mais, à l’inverse, si vous partez du principe que c’est infaisable, vous n’y arriverez jamais non plus.
Bref, laissez-vous surprendre par votre chien : il a sans doute bien plus à vous offrir que ce qui est écrit sur son mode d’emploi officiel !
• POURQUOI leur apprendre le rappel ?
Si vous êtes partisans de la promenade « en libre », les raisons sont évidentes : une plus grande autonomie pour vous et votre animal, qui se dépense mieux, ainsi que la sensation d’une relation de confiance renforcée entre vous. Un sentiment particulièrement agréable, ne nous voilons pas la face.
Si vous êtes contre ou que vous ne le sentez pas et que votre Shiba sera toujours promené en longe -mais oui, il ne sera pas malheureux pour autant et cela ne fera pas de vous un mauvais maître (je préfère anticiper avant de voir une horde de commentaires vindicatifs à ce sujet )- rien ne vous empêche de le travailler un minimum également. Bien au contraire.
Pourquoi me direz-vous, puisqu’il sera tout le temps attaché ? Parce qu’il arrivera forcément une fois où vous lâcherez la laisse par accident, où le collier cassera ou encore un jour où votre vieil oncle, qui fait systématiquement des adieux interminables sur le seuil du portail, le laissera s’échapper. À ce moment-là, vous vous féliciterez d’avoir fait ce travail plutôt que de vous égosiller telle une poissonnière un jour de marché en lui courant après en panique.
• Ok, mais COMMENT y arriver ?
Il n’y a pas de secret : comme pour toute autre pratique, on débute tôt et en on y va progressivement.
Étape 1 :
On s’y met donc dès les premières semaines et on profite pleinement d’un atout majeur durant cette période : le suivi naturel du chiot.
En effet, ce dernier restera littéralement collé à vos baskets durant les premiers mois et ne commencera véritablement à s’aventurer bien plus loin qu’à l’arrivée de l’adolescence, la confiance et les hormones aidant. Vous aurez donc jusqu’à ce moment-là pour fixer le rappel efficacement. Après, ce sera toujours possible mais plus compliqué à intégrer.
On choisit également un environnement pauvre en distractions au début, c’est à dire un lieu dépourvu d’odeurs nouvelles, d’autres chiens, etc, et dans lequel votre Shiba pourra donc se concentrer facilement : dans votre appartement ou votre jardin par exemple.
Enfin, une fois toutes ces conditions réunies, on peut rentrer dans le vif du sujet : associer chaque retour vers vous comme quelque chose d’ultra-positif. C’est bien simple, à chaque fois qu’il revient vers vous, vous devez l’accueillir comme s’il venait de gravir l’Himalaya ou de résoudre le problème de la faim de la monde. Joie hystérique, félicitations en pagaille, pluie de friandises… bref, vous m’avez compris : revenir vers vous doit être le truc le plus cool au Monde à ses yeux !
Étape 2 :
Là, on passe aux choses sérieuses. Je pars du principe que l’étape 1 est relativement maîtrisée.
Avant toute chose -même si c’est une évidence- assurez-vous de choisir un lieu calme et « sécurisé » que vous connaissez bien. J’entends par là, dépourvu de routes à proximité, de chasseurs avinés ou de tout autre danger immédiat pour votre chien.
Choisissez également le bon moment pour commencer à travailler. Si, en arrivant sur les lieux, il a envie de jouer avec des copains ou d’explorer l’environnement, laissez-le faire. Sinon, vous vous mettrez d’office en position d’échec : il n’aura pas la tête à vous écouter et ce sera contre-productif, pour vous comme pour lui.
Ensuite, vous pourrez travailler de la même façon qu’à la première étape, à l’aide d’une longe de 10 mètres par exemple, d’abord en la tenant (histoire de vous rassurer), ensuite en la laissant traîner au sol.
L’environnement étant plus riche et intéressant pour votre chien que votre jardin ou votre appartement, sa récompense devra être choisie en conséquence : là, on sort donc l’artillerie lourde avec petits morceaux de jambon ou de fromage, pâté de foie, etc. On ne lésine pas.
Il vous faudra également déterminer un mot d’ordre associé à son retour vers vous comme « reviens » ou « au pied ». Qu’importe au final, pour peu que vous utilisiez le même à chaque fois.
Au début, il y aura forcément quelques petits ratés mais, dans tous les cas, on fait preuve de patience et on reste positif !
Étape 3 :
Même chose qu’à l’étape 2… sauf qu’on libère la bête ! La première fois, vous serrerez les fesses et c’est bien normal
Si vous ressentez que votre chien est trop distrait, absent, ou tout simplement que vous ne vous sentez pas de le faire, par peur de… ne le faites pas ! Continuez à travailler l’étape 2 et dites-vous que c’est déjà bien d’être arrivés jusque-là.
Je vous encouragerais également à vous rapprocher d’un éducateur en positif qui pourra vous accompagner efficacement lors de cette dernière étape, si vous le désirez.
• Trucs & ASTUCES :
– Accroupissez-vous. Ça paraît bête mais cette posture étant plus accueillante et moins impressionnante pour votre chien, il sera plus disposé à revenir que si vous restez de toute votre hauteur.
– Variez les récompenses. Si nous sommes d’accord que la valeur de ces dernières devra toujours être élevée pour le rappel, ne pas en changer finira par engendrer une perte de valeur auprès de votre compagnon qui s’en lassera.
– Utilisez le jeu. Vous cacher de temps en temps, derrière un arbre par exemple, obligera votre chien à toujours rester en alerte et à vérifier régulièrement votre position. Évidemment, quand il vous retrouve, c’est synonyme de félicitations et de récompenses.
– Laissez-lui choisir l’itinéraire. C’est son moment à lui. Il veut tourner à gauche et cela ne présente aucun danger ? Tournez à gauche. Moins votre chien sera frustré plus il sera à votre écoute.
– Évitez les rituels. Si, vous le rattachez systématiquement en fin de balade, il comprendra vite que vous voir vous approcher la laisse à la main n’est pas dans son intérêt et il ne reviendra pas. Il faut donc brouiller les pistes et le rattacher/détacher de nombreuses fois durant la balade, pour quelques secondes seulement et en le félicitant bien entendu. Même chose si vous empruntez le même chemin pour retourner à votre voiture : variez les itinéraires.
– Apprenez à anticiper ses actions. Cela demandera un peu de temps mais, au fur et à mesure que vous apprendrez à connaître votre Shiba, vous arriverez à le « lire » et savoir quand le rappeler avant qu’il ne se déclenche et qu’il ne vous écoute plus. Par ailleurs, soyez toujours attentifs à l’environnement durant vos balades. S’il fait de la prédation ou qu’il est réactif aux cyclistes par exemple, c’est votre responsabilité que de le rappeler avant qu’il ne soit trop tard et c’est toujours plus simple à faire quand on n’a pas les yeux rivés en permanence sur l’écran de son téléphone par exemple…
– Adaptez-vous à votre chien. S’il n’est pas gourmand, utilisez un jouet. S’il n’est ni gourmand ni joueur, utilisez la voix et les caresses. S’il n’aime rien de tout ça, allez à l’église pour allumer un cierge.
• Ce qu’il ne faut PAS faire :
– Le faire revenir avec de la nourriture. La friandise, c’est une récompense une fois qu’il est revenu et non un appât pour l’attirer car, le jour où vous n’en aurez pas sur vous, vous pourrez vous brosser pour qu’il revienne.
– Se contenter de l’appeler par son prénom. C’est ballot mais beaucoup de gens oublient qu’un prénom ne veut pas dire « reviens ».
– Faire son radin. Certaines personnes sont contre les friandises, estimant que le chien doit revenir uniquement pour leurs beaux yeux. Si cette vision de l’éducation est touchante d’idéalisme et de naïveté, elle oublie juste une chose, une règle pourtant essentielle : le chien est un animal opportuniste qui fait ses choix en fonction de la satisfaction immédiate qu’il en tirera.
Autrement dit, entre une partie de jeu ou encore une odeur intéressante et revenir vers vous, sans aucune récompense à l’arrivée, son choix sera souvent vite fait. Idem pour ceux qui récompensent avec des croquettes : c’est le SMIC de la récompense et ça ne pèsera pas bien lourd dans la balance.
– Utiliser un sifflet ou tout autre objet du genre. L’idée n’est pas mauvaise en soi mais, le jour où vous ne l’avez pas avec vous…
Donc, privilégiez un signal distinctif que vous pourrez reproduire facilement en sifflant ou en tapant dans les mains, etc.
– Lui courir après. Vous connaissez l’adage, « Suis-moi je te fuis, fuis-moi je te suis » ? Eh bien avec votre Shiba ce sera pareil. S’il ne veut pas revenir, la meilleure solution est de partir dans la direction opposée.
– Être tout le temps sur son dos. Je croise régulièrement des gens qui spamment des ordres toutes les 5 secondes à leur chien et sont dans le contrôle permanent. Outre le fait que ce soit frustrant pour l’animal, dites-vous bien que la voix de ses maîtres deviendra vite comme un bruit de fond pour ce dernier qui finira par ne plus l’entendre.
Vous voulez un rappel efficace ? N’en abusez pas !
Posez-vous toujours la question suivante : « là, ai-je vraiment besoin de le rappeler ? »
– L’engueuler. Là aussi, ça paraît évident et pourtant, je le vois encore régulièrement. Votre chien met beaucoup plus de temps à revenir ? Vous êtes pressés et il vous met à bout de nerfs ? Ne cédez pas à la colère. Même s’il vous a fait poireauter 5 minutes dans le froid et que vous avez envie de le passer à la moulinette, félicitez-le à son retour ! Pourquoi ? Parce que je ne connais personne sur Terre pressé de venir se faire engueuler… et vous ?
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Voilà. En espérant que cela vous sera utile et que je n’aie pas oublié trop de trucs en chemin. N’hésitez pas si vous avez des questions !
Sinon, lisez l’article Choisir son éducateur canin pour vous aider dans l’éducation de votre animal !